En 1984, la culture hip hop fait ses premiers pas en Europe. La France découvre le hip hop à la télévision grâce à Sidney et le breakdance fait son apparition dans les gares et sur les terrains vagues de région parisienne. C’est au cours de cette année charnière qu’Iffra Dia, traversé par un message d’espoir et d’union véhiculé aux prémices du mouvement hip hop, intègre Black Blanc Beur, la première compagnie de danse hip hop professionnelle en France. Quatorze ans avant la finale France-Brésil, il participe à l’émergence du b-boying et à la construction de sa légitimité sur scène, tout en affirmant une vision de la danse sans contrainte, portée par la singularité d’un style en évolution et par la liberté qu’il suppose.
Au fil des rencontres et des représentations, son approche gestuelle évolue de manière empirique en se confrontant au jazz, aux danses debout, puis au langage contemporain, pour construire un vocabulaire et une vision personnelle du mouvement. L’expression du corps devient le support d’une quête visant à se défaire du déracinement qui lui est imposé et se reconnecter à son héritage immatériel. Le chorégraphe et danseur, qui se considère comme « passeur de culture(s) », porte un regard singulier et humaniste sur la danse, orienté vers l’introspection, l’instant et la transmission.
Trente ans après ses débuts, Iffra Dia passe de l’autre côté du rideau en concevant un triptyque orienté vers la poursuite d’identité. Hors jeux ! (2011) met en scène la déconstruction du parcours du chorégraphe, fait de transgression et d’apprentissage des possibilités toujours nouvelles que le corps offre. La construction de l’individualité se heurte à l’altérité et au collectif dans Issue de secours (2013), pour trouver un écho dans 3.0 (2017), un trio féminin explorant l’autre comme un reflet permettant de lutter contre le repli sur soi.
En 2019, il signe Passacaille, avec le violoniste Fabien Boudot, un duo à la croisée du baroque et du hip hop. Dans la continuité de la conférence-performance From Scratch (2019), le projet participatif Post Danse (2021), propose d’interroger le rapport entre tradition et présent, en abordant cette fois, l’impact de la culture numérique dans le geste dansé.